Une SCI peut donner en location ses biens à ses associés. Toutefois, des précautions doivent être suivies pour éviter le conflit d’intérêt et une optimisation fiscale abusive que l’administration fiscale n’hésitera pas à remettre en cause.
Rien n’interdit à une société civile immobilière (SCI) qui détient des biens locatifs de les louer à ses propres associés. Ce schéma, dit de location à soi-même, ne doit toutefois pas conduire à une optimisation fiscale, au risque d’être sévèrement redressée sur le fondement de l’abus de droit.
La location à soi-même
L’expression de location à soi-même est un raccourci. En réalité, c’est la SCI, propriétaire de ses actifs immobiliers, qui les loue à ses propres associés. Ceux-ci se retrouvent dans la situation de locataires et de propriétaires indirects, puisqu’ils détiennent des parts sociales de la SCI qui les donne à bail. C’est un mécanisme couramment mis en place par les entrepreneurs. L’entrepreneur créée une SCI qui achète un local commercial et le loue à l’entreprise. Ce schéma peut être adopté avec logements et des baux habitation.
Le recours à une SCI présente notamment l’avantage de permettre à ses associés de déduire de leurs revenus fonciers, les intérêts d’un emprunt contracté pour l’acquisition du bien immobilier occupé par l’associé comme résidence principale ou secondaire, ainsi que les éventuels travaux d’entretien, de réparation ou d’amélioration réalisés.
Attention à ne pas abuser
Les associés doivent toutefois se garder d’utiliser ce schéma à des fins fiscales dans le cadre d’une SCI dite transparente, c’est-à-dire soumise à l’impôt sur le revenu. En effet, ils pourraient être tentés de profiter de la possibilité de déduction des intérêts et des travaux pour créer un déficit du même niveau que les revenus issus des loyers.
Lorsque la manipulation est flagrante, l’administration fiscale n’hésite pas à redresser les associés sur les revenus fonciers qui auraient été imposables en l’absence de déficit foncier sur le fondement de l’abus de droit fiscal. L’exemple suivant est une illustration des opérations à éviter.
Une affaire d’abus de droit
Une SCI propriétaire de logements a conclu trois baux d’habitation avec trois de ses associés membres de la même famille. Pour financer des travaux d’entretien, de réparation et d’amélioration de ses biens, la SCI a souscrit plusieurs emprunts bancaires. Et pour compenser les périodes de travaux, la SCI a accordé à ses locataires des allègements significatifs de loyer pendant trois ans.
Durant cette période, ses charges dépassaient ses loyers encaissés, la SCI a donc déclaré un déficit foncier (s’agissant d’une SCI à l’impôt sur le revenu, ce sont les associés qui ont déclaré ce déficit). Or, ce déficit était tel, qu’il rendait non imposables les revenus fonciers perçus par ailleurs par les associés, à travers une autre SCI. Dans cette affaire, l’administration fiscale comme le Comité de l’abus de droit fiscal ont conclu à l’abus de droit et rejeté le déficit foncier déclarés par les associés de la SCI (CADF, 29 sept. 2022, aff. n° 2022-07, n° 2022-08 et n° 2022-09).
Ne pas mélanger les rôles
Pour que la location à soi-même se soit pas exposée à un risque d’abus de droit, la SCI doit se comporter avec ses locataires associés comme avec n’importe quel autre locataire. Ainsi, la SCI doit fixer un loyer qui correspond à la réalité du marché locatif.
Ensuite, elle doit prendre charge uniquement les travaux qui incombent, par la loi, au propriétaire. De leur coté, les locataires, bien qu’associés, doivent supporter personnellement les charges qui incombent au locataire. Autrement dit, le fait que le locataire soit un associé doit être neutre du point de vue du bail, et de sa bonne exécution.